Congrès "Urgences 2018" - Discours de Agnès Buzyn

Madame la Présidente de la Société française de médecine d’urgence, Docteur Agnès Ricard-Hibon, 
Monsieur le Président du Conseil national de l’urgence hospitalière, Professeur Pierre Carli,
Monsieur le Président de Samu-Urgences de France, Docteur François Braun,
Monsieur le Président de l’Association des médecins urgentistes de France, Docteur Patrick Pelloux,
Mesdames, Messieurs,

Ma venue au Congrès l’année dernière figurait parmi mes premiers déplacements dans mes nouvelles fonctions, et je me souviens, comme si c’était hier, des attentes que vous aviez exprimées.


1. L’actualité des urgences a été très dense cette année, c’est vrai, 

mais cette année a aussi été celle du renouvellement du Conseil national de l’urgence hospitalière (CNUH) ce lieu d’échange si essentiel pour les acteurs des urgences hospitalières, cette instance à qui je dois d’importantes contributions, si utiles à mon action, à notre action collective. 
Ce renouvellement a été l’occasion d’élargir les missions du Conseil, afin qu’il émette pour organiser la prise en charge des urgences collectives en cas de situations sanitaires exceptionnelles. 

Sur ce point, je tiens à vous remercier, cher Professeur Carli, pour les travaux conduits sous votre présidence, et, plus généralement, pour votre investissement, sans faille, dans la vie de cette commission.


1.1. Si je passe en revue la liste des travaux menés,

C’est la gestion des tensions hospitalières hivernales et estivales qui me vient en premier à l’esprit.
En septembre dernier, vous m’aviez alertée sur les tensions hospitalières hivernales à venir. Le séminaire que j’ai présidé, le 30 novembre, a réuni autour d’une même table, 
tous les acteurs de l’offre des soins, en vue d’une meilleure organisation, de bonnes pratiques et de pistes d’amélioration. 
Nous devons rester attentifs à la mise en œuvre :
 du décret sur l’encadrement du travail temporaire des praticiens intérimaires dans les établissements publics.
Je le rappelle, ce décret prévoit :
de sécuriser les conditions de mise à disposition de praticiens par les entreprises de travail temporaire ; et de plafonner les dépenses qu’un établissement peut engager pour chaque mission d’intérim.


1.2. Vous m’aviez également alertée sur les difficultés estivales.

Vous avez travaillé à l’instruction du décret devant clarifier et étendre :
… la possibilité de mutualisation, jusqu’à un seul médecin, pour les lignes de garde des services d’urgence et des SMUR, dans les établissements de santé à activité réduite.
Le ministère, fort des échanges de ces derniers mois et en ne méconnaissant pas certains désaccords qui se sont exprimés, conduira la réforme globale de l’autorisation d’activité de médecine d’urgence : 
pour répondre aux limites actuelles de notre organisation, et pour définir l’offre de médecine d’urgence pour demain. 
En outre, pendant l’été 2017, la France a connu 4 épisodes de canicule. Conformément au plan national canicule (PNC), ces épisodes ont fait l’objet d’un suivi quotidien, 
et des actions de communications, adaptées aux populations les plus vulnérables, ont été faites aux niveaux local et national. 
Un retour d’expérience aura lieu avec les agences régionales de santé et les agences sanitaires. Les conclusions seront présentées lors d’un prochain comité de suivi et d’évaluation du plan national canicule.


1.3. Je pense aussi à la première étape du chantier concernant l’aval des urgences, chantier qui touche à sa fin.

Cette étape a été confiée au Conseil national de l’urgence hospitalière, avec l’Agence Nationale d’Appui à la Performance et de la Fédération des Observatoires Régionaux des Urgences.
Elle devait proposer des outils de mesure objective des difficultés d’hospitalisation des patients en aval des urgences.
Nous le savons, le retard d’admission dans le bon service :
-* non seulement accroît la morbi-mortalité des patients, 
mais aussi génère de la tension et de pénibilité pour le personnel soignant. 
Ce sujet, je le sais bien, est particulièrement sensible pour certains publics, je pense surtout aux patients âgés et/ou poly-pathologiques. 36 millions d’euros seront consacrés à la généralisation de la présence d’infirmiers de nuit dans les EHPAD d’ici à 2020. 

Pour autant, le chantier de l’aval des urgences nécessite de repenser le système dans son ensemble. 
Ces travaux rejoignent les objectifs de la stratégie de transformation du système de santé (STSS), dont les premières conclusions seront bientôt annoncées par le président de la République.


1.4. En effet, faciliter la prise en charge des patients en aval des urgences, c’est aussi améliorer vos conditions de travail ; tout comme celles des personnels non médicaux.

Sur ce point, je ferai tout pour garantir l’attractivité de votre profession urgentiste pour les jeunes médecins en formation.
La réforme du 3ème cycle des études de médecine a créé de nouveaux diplômes d’études spécialisées, dont un diplôme de médecine d’urgence.
À la rentrée universitaire 2017, les étudiants ont pu intégrer la spécialité de médecine d’urgence directement à l’issue des Épreuves Classantes Nationales.
De plus, un stage en médecine d’urgence est désormais prévu pour tous les internes de médecine générale, pendant leur première année d’internat.


2. Vous le voyez, et d’ailleurs vous le savez, nous avons de grands défis à relever.


Car, si l’aval des urgences est source de préoccupation, l’organisation de l’amont des urgences l’est tout autant.


2.1. A ce titre, le député Thomas Mesnier, médecin urgentiste de formation, m’a remis le 22 mai dernier son rapport sur l’organisation territoriale des soins non programmés.

Trois axes d’amélioration ont été retenus par le rapporteur :
-* structurer sur les territoires la réponse à la demande de soins non programmés, 
renforcer la régulation médicale dans l’orientation des patients, 
et favoriser la fluidité du parcours de ces patients. 
Des propositions ont été mises sur la table et sont débattues dans le cadre des consultations de la stratégie de transformation du système de santé ou du plan d’accès aux soins.


2.2. Le ministre de l’Intérieur et moi-même avons missionné les inspections générales de l’administration et des affaires sociales pour faire un bilan de la mise en œuvre du référentiel du secours d’urgence à personne, et de l’aide médicale urgente.

Ce bilan doit tenir compte, à la fois : 
des évolutions d’organisation sur le terrain, et de l’objectif du président de la République, à savoir simplifier la prise en charge des appels d’urgence, et développer les plateformes d’appels.
Mieux orienter nos patients est donc un enjeu crucial pour la qualité de la prise en charge mais aussi – ou plutôt, devrais-je, et aussi – pour l’efficacité de notre système de soins.


2.3. Or, ces dernières semaines, l’actualité a été marquée par un drame qui remet en question le fonctionnement des SAMU.

Comme vous, j’ai été très marquée par les circonstances du décès de Naomi Musenga, qui font l’objet d’une mission d’inspection à ma demande, afin que toute la clarté soit faite sur ce drame.
Le 14 mai, j’ai demandé à vos représentants de remettre pour juillet des propositions, pour une meilleure prise en charge des appels : en actualisant les procédures de traitement de ces appels, et en formant mieux les personnels qui répondent au téléphone. 
Nous avons l’obligation d’apporter aux Français l’assurance que cette qualité est au rendez-vous.


2.4. Le projet de modernisation du système d’information et de télécommunication des Samu-Centres 15, dit programme SI SAMU, contribue déjà à la sécurisation de la prise d’appels.

Depuis l’an dernier, le projet est entré dans sa phase de réalisation : dans quelques mois, un programme pilote sera mis en place à Mulhouse, avant que ne suivent d’autres pilotes.


3. Quant aux catastrophes et aux attaques de ces derniers mois, elles nous ont rappelé que nous devons nous préparer aux situations de crise, à toutes les situations de crise.


-* Le 6 septembre dernier, les îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy étaient touchées par le cyclone IRMA, ce qui a provoqué un désastre sans précédent sur notre territoire ;

-* Le 28 novembre, un incendie au centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre a conduit à l’évacuation urgente des patients et à l’installation d’un hôpital de campagne ;

-* Le 14 décembre, le terrible accident de Millas entre un bus et un train provoquait la mort de 6 enfants et fait 17 blessés ;


Rappelons-nous aussi : 

des attaques terroristes de Carcassonne et de Trèbes, perpétrées le 23 mars dernier, et qui ont fait 5 morts ; et l’attaque de Paris le 12 mai qui a tué une personne et blessé 4 autres. 

De ces évènements dramatiques, les Français ont pu tirer une certitude, toujours renouvelée : 
celle de pouvoir compter, en toutes circonstances, sur l’excellence de notre système de santé, en particulier des structures de médecine d’urgence. 

Nous avons la chance d’avoir un système en alerte, des professionnels mobilisés, et une organisation à toute épreuve.

Je tiens ici à rendre hommage à votre implication, totale, constante : vous êtes un bel exemple de service rendu à la Nation.

La réponse de notre système de santé lors de ces crises est un axe fort ; et je veux lui donner davantage d’ampleur :

-* en renforçant le dispositif de réponse aux situations sanitaires exceptionnelles (ORSAN) ;
-* et en actualisant la préparation des établissements de santé aux crises, le Plan blanc.


Mesdames et Messieurs,
Après une année à vos côtés, je mesure au quotidien votre implication dans vos missions aux côtés des patients. 
Des missions difficiles, exigeantes, marquées par des situations de détresse, où :

où vous faites preuve, à la fois, d’urgence dans l’action, d’implication ; et de patience dans la réflexion, de sang-froid, où votre professionnalisme sauve des vies, celles de nos concitoyens. 

Le président de la République se prononcera prochainement sur les orientations de l’hôpital et du système de santé de demain.

Je sais pouvoir compter sur votre engagement pour mener à bout ces chantiers.

Je vous remercie.



Discours de Agnès Buzyn